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Un vin qui ne manque pas d'air !

Samedi 01 juillet 2017 à 07h

Cette semaine, Claudine, de Marchenoir, écrit à Aymeric Rouillac, commissaire-priseur. Elle souhaite connaître l’utilité et l’âge d’un bien curieux objet.



Cet objet a une structure en fer forgé composée d’une longue tige reposant sur trois pieds à enroulement. Le fût central reçoit d’un côté un cône de métal dans lequel se niche un récipient en verre, et de l’autre un bras sur lequel est fixée une coupelle à monture ajourée qui reçoit une bougie. Le récipient en verre adopte la forme d’un carafon tronconique muni d’une anse dont la panse est gravée de pampres de vigne. Il est perforé en partie inférieure et accueille dans cet orifice ce que Claudine nomme « une pipette ». Ce décor nous oriente a priori vers un objet lié au vin. En effet, il s’agit d’un décanteur.

Cette mésaventure est arrivée à chacun d’entre nous : alors que l’on pense savourer la dernière goutte de ce vieux vin de notre verre, c’est aussi tout le dépôt qui envahit notre bouche… Quel moment désagréable ! Il existe un remède : le décanter au préalable. Cet acte se pratique à la seule lueur de la bougie, afin de ne pas brusquer le précieux breuvage. Le contenu du flacon est délicatement versé dans le réceptacle en verre. Goutte après goutte, séparé du dépôt solide, il s’écoule lentement dans une carafe posé en dessous de la « pipette ». Certains sommeliers se dressent vent debout contre cette pratique jugée violente. En effet, cette oxygénation extrême risque de tuer certains vieux vins. Il est recommandé de ne procéder de la sorte qu’avec des vins « solides », puissants et tanniques. D’une façon générale, ce sont ainsi les grands Bordeaux et grands vins de la Vallée du Rhône qui sont à même d’être bonifiés par cette opération. Claudine ne se souvient plus comment cet ustensile est arrivé chez elle. Un aïeul œnophile ? Stylistiquement très sobre, son allure rappelle vaguement les chandeliers médiévaux nommés « rats de cave ». Il a au maximum cent ans. Cet objet, peu courant, ravira un amateur ou un vigneron pour environ 80 € en brocante.

À la suite des Romains, les Gaulois se sont emparés de la vinification, et l’ont sublimé ! Tout le monde antique s’arrache leurs vins et la production de l’Empire s’en trouve fortement concurrencée, tant et si bien que l’Empereur Domitien, au Ier siècle, publie un décret interdisant la plantation de nouvelles vignes en Gaule ! Rien n’y fait. Ajoutez à cela l’invention de la barrique en bois cerclée de fer au IIe siècle. Cette technique imparable pour le vieillissement, la conservation et le transport du précieux breuvage donnera aux peuples Gaulois une suprématie qu’ils conservent depuis 2 000 ans ! Ce sont ensuite les moines qui développent considérablement la production, en particulier suite aux grands défrichements commencés au 10e siècle. C’est à eux que nous devons l’implantation de « notre » pineau d’Aunis au IXe siècle. Connu depuis l’Antiquité, il est le plus ancien cépage de Loire et fait aujourd’hui la fierté et la renommée (du moins en partie) des vignerons du Vendômois.

Venez donc en déguster un verre, en musique, à l’occasion d’un banquet donné dans le parc du Château de Vendôme ce soir, à partir de 19h30.
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