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Pour une mèche de ses cheveux ...

Samedi 09 juillet 2011

Cette semaine, une lectrice nous envoie la photo d’ « un petit cadre avec un verre bombé, contenant une composition ». Elle souhaite « en savoir plus sur ce type de réalisation et son époque ». Ce cadre ovale, en bois noirci, mesurant probablement entre dix et quinze centimètres, comprend effectivement un petit décor, composé d’un bouquet de fleurs retenues par un ruban, sur fond blanc. Ce type de composition est caractéristique d’une production qui connaît un grand développement au XIXème siècle : les souvenirs en cheveux. Le bouquet est en effet composé de mèches de teintes plus ou moins foncées, souvenirs d’un parent défunt, reconstituant des pensées.

Cette semaine, une lectrice nous envoie la photo d’ « un petit cadre avec un verre bombé, contenant une composition ». Elle souhaite « en savoir plus sur ce type de réalisation et son époque ». Ce cadre ovale, en bois noirci, mesurant probablement entre dix et quinze centimètres, comprend effectivement un petit décor, composé d’un bouquet de fleurs retenues par un ruban, sur fond blanc. Ce type de composition est caractéristique d’une production qui connaît un grand développement au XIXème siècle : les souvenirs en cheveux. Le bouquet est en effet composé de mèches de teintes plus ou moins foncées, souvenirs d’un parent défunt, reconstituant des pensées.

Cette tradition a de lointaines origines. Depuis fort longtemps, on tente de perpétuer la mémoire d’un être disparu en gardant ses restes mortels. Au Moyen-Age se développe ainsi dans toute la Chrétienté le culte des reliques. Les croyants demandent aux saints leur intercession auprès de Dieu, et attribuent à leurs ossements, conservés dans des châsses en métaux précieux, des pouvoirs miraculeux. Ainsi par exemple, on vénéra à Vendôme en l’abbaye cardinalice de la Trinité, jusqu’à la Révolution, une larme que le Christ a versée sur le tombeau de Lazare.

Plus tard, en dehors de la sphère religieuse se développe une pratique proche, qui consiste à garder les cheveux d’un être cher et à les arranger de façon à composer un bijou ou un décor à encadrer.Personnellement nous connaissons une noble famille vendômoise qui conserve et vénère des poils de la barbe d’Henri IV, recueillis en novembre 1589 lors du siège qu’il livra à Vendôme…Parallèlement, on sait ainsi qu’Agrippa d’Aubigné, poète contemporain d’Henri IV, possédait un bracelet composé des cheveux de sa bien-aimée. A la mort de Louis XVI et de Marie-Antoinette, leurs proches récupèrent des mèches de leurs cheveux. Celles-ci sont gardées précieusement et, après l’Empire, lors de la Restauration, les cheveux de ceux que l’on considère comme des martyrs de la Révolution sont exposés dans des cadres, présentés dans de petits médaillons, ou même des bagues. Il en ira de même pour Napoléon contribuant ainsi à sa légende.

Le XIXème, siècle du Romantisme, connaît l’apogée de ces souvenirs. Les mèches sont désormais présentées de façon à composer les initiales de l’être cher disparu ou, comme c’est le cas ici, un bouquet de fleurs. Parfois, les cheveux, réduits en poudre, servent même à composer un paysage. Des bijoux – colliers et bracelets – sont également produits à partir de cheveux. D’abord réalisés par les coiffeurs, ils deviennent ensuite l’œuvre d’artisans spécialisés. Au revers du cadre que l’on observe aujourd’hui figure ainsi une petite étiquette bleue, portant les mentions : « L. Duval, Coiffeur naturaliste, Rue du Milieu, Courville, dessins en cheveux ». On sait également, par cette étiquette, que cet artisan réalisait également des « emballages d’oiseaux » et des « têtes de chevreuils »… !

Art capillaire et émotion pour les cheveux de nouveaux nés habilement présentés figurant assez souvent un saule pleureur… conservatoire et reliquaire familial. Cette véritable industrie, qui a ses codes déontologiques et participe aux Expositions universelles, décline cependant à partir du début du XXème siècle Les cadres à décors en cheveux, devenus désuets, d’ailleurs on ne porte plus le deuil comme autrefois : brassard, cravate noire, mantille, et cadre de cheveux sont relégués au fond des placards. Pourtant, en 1937, une première exposition rétrospective leur est consacrée. Le Musée des Arts et Traditions Populaires, anciennement situé à Neuilly-sur-Seine et prochainement déplacé à Marseille, en conserve un grand nombre. Les souvenirs en cheveux sont parfois collectionnés à titre particulier, et en bel ensemble provenant d’une collection tourangelle fut vendu à l’Hôtel des ventes de Vendôme en mai 2010 à de jolis prix, notamment pour un bracelet en or émail et cheveux blonds...au parfum capiteux à base de musc. Cependant, en dehors du cas où il s’agit de souvenirs historiques tels que ceux de la famille royale, le prix de tels objets, surtout lorsque le décor est relativement simple, ne dépasse guère les 50 €. La valeur sentimentale, elle, n’a pas de prix…
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