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Fleurs de verre

Samedi 18 mars 2017

Cette semaine, Véronique, de Vineuil, écrit à Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, car elle souhaite connaître l’estimation d’un vase de famille.



Lundi c’est le printemps ! La nature sort de son sommeil et déjà les perce-neiges cèdent la place à des fleurs plus colorées : narcisses, primevères, pensées ou encore violettes. Cette renaissance et les merveilles de la nature ont fasciné une génération d’artistes qui œuvrent à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Leur mouvement fut nommé Art Nouveau. Chose rarissime dans l’histoire de l’Art, ce n’est pas Paris qui donne le ton mais Nancy, en Lorraine. Rompant avec le style composite et lourd à la mode jusqu’à présent, l’école de Nancy s’inspire de la nature, et en particulier de la faune et de la flore des marais. Ainsi naît le bureau aux nénuphars de Jacques Majorelle ou encore le guéridon aux libellules d’Émile Gallé.
Point de libellules ou de nénuphars sur le vase en verre de Véronique, mais des violettes. Elles sont traitées en polychromie avec grande finesse. On distingue les nervures des feuilles et des fleurs. Comble de la préciosité, tiges et feuillages sont rehaussés de traits d’or fin. Le fond blanc givré (sablé) met parfaitement ce décor naturaliste en valeur. Passez votre doigt, les violettes sont en léger relief. C’est le fruit d’une technique bien particulière : le verre multicouche gravé. Lors du soufflage, le verrier dispose plusieurs couches de verre les unes par-dessus les autres, comme un mille-feuille. Le décorateur viendra enlever de la matière à l’aide d’acides ou d’une roue (comme celle du dentiste) jusqu’à faire apparaitre la couche souhaitée. Ici, la couleur des violettes est obtenue par émaillage. Le vase est signé Daum Nancy, avec une croix de Lorraine, un des plus grands verriers de l’époque !
Cette cristallerie dirigée par les frères Auguste et Antonin Daum échappe de justesse à la faillite à la fin du XIXe. Les premières créations consistent à l’embellissement de services de table courants. Mais les Daum s’orientent bien vite vers la création artistique. Ils commencent par des modèles simples puis montent en puissance avec des pièces exceptionnelles rivalisant avec le grand Émile Gallé. Distinguée dans toutes les expositions auxquelles elle participe, la cristallerie Daum devient une industrie d’art à renommée mondiale qui ne créera pas moins de trois mille pièces entre 1890 et 1914. Elle existe toujours aujourd’hui et son nom rime encore avec luxe et excellence à la française.
De forme ovoïde, ce vase est en verre multicouche bleu et blanc. Il mesure 12 cm de haut et 10 cm de diamètre. Malgré sa petite taille, il se négociera entre 300 et 500 € en vente aux enchères.
Un seul regret : il ne diffusera par le délicieux parfum des violettes qui nous ravissent en cette saison.
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