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Le rêve oriental dans votre salon

Samedi 19 février 2011

Cette semaine, une lectrice nous envoie la photo d’une « statuette en porcelaine de 13 cm de hauteur». Il s’agit d’un homme barbu, tenant de la main gauche un pichet. S’il est vêtu d’un grand manteau marron et de souliers à boucles comme l’on pouvait en porter dans la France de l’Ancien Régime, sa culotte bouffante jaune et son turban bleu semblent plutôt évoquer des régions lointaines… Il se tient sur une petite terrasse, peinte de vert et de brun, et évoquant le sol d’un chemin de campagne, sur lequel se distingue une petite fleur rose.

Cette semaine, une lectrice nous envoie la photo d’une « statuette en porcelaine de 13 cm de hauteur». Il s’agit d’un homme barbu, tenant de la main gauche un pichet. S’il est vêtu d’un grand manteau marron et de souliers à boucles comme l’on pouvait en porter dans la France de l’Ancien Régime, sa culotte bouffante jaune et son turban bleu semblent plutôt évoquer des régions lointaines… Il se tient sur une petite terrasse, peinte de vert et de brun, et évoquant le sol d’un chemin de campagne, sur lequel se distingue une petite fleur rose.

Ce petit sujet a été réalisé en porcelaine. Ce type de céramique, dont le procédé fut découvert en Chine au VIIIème siècle de notre ère, a longtemps fasciné les Européens. Jusqu’au XVIIIème siècle, on ne produisait en France que des terres cuites, des grès et des faïences. Ces dernières tentaient, par leur blancheur, d’égaler la porcelaine, mais l’aspect demeurait différent. Après de nombreuses tentatives, c’est finalement un Allemand, Böttger, qui découvre le secret de la porcelaine en 1709. Son ambition était grande : il voulait en effet découvrir le mystère de la « pierre philosophale », cette fameuse substance permettant de changer les métaux pauvres en or, de guérir les maladies et de prolonger indéfiniment la jeunesse ! Si ce vaste programme ne put aboutir, Böttger acquit néanmoins la célébrité en réalisant les premières véritables porcelaines européennes. Pour cela, il avait ajouté une argile blanche très fine, le kaolin, à la composition de sa pâte, et l’avait fait cuire à haute température, aux alentours de 1400°C. À Meissen, en Saxe,près de Berlin, fut créée une grande fabrique. Puis, au milieu du XVIIIème siècle, le roi de France Louis XV, sous l’influence de sa favorite la marquise de Pompadour, créa sa propre manufacture de porcelaine, installée à Vincennes puis transférée à Sèvres. La première véritable porcelaine française apparaît enfin, en 1767 !

À cette époque, la grande mode dans les salons était à l’Orient et aux« turqueries ». Une dame de goût se devait d’avoir dans son intérieur un meuble orné de laques du Japon et des fauteuils garnis de broderies ornées de« chinoiseries ». Le décor était parfois complété par de petits sujets en céramique, disposés dans des vitrines, et évoquant ces pays lointains. Le nôtre, d’après son turban et sa culotte bouffante pourrait bienêtre un « Ottoman ». La Turquie, aux portes de l’Europe, et Constantinople, la Sublime Porte, inspiraient également la mode française du XVIIIème. Mais il ne faudrait pas rechercher là l’image documentaire d’un personnage oriental ; ce qui importe, c’est le rêve et la poésie… Le pichet que porte le personnage et le linge noué à sa taille peuvent également évoquer le porteur d’eau, ou le cabaretier, l’un de ces nombreux « petits métiers » qui existaient autrefois. L’eau courante et le tout à l’égout ne remontent qu’à une centaine d’années. Auparavant, on allait chercher l’eau au puits à la campagne, ou bien on l’achetait à un porteur d’eau en ville…

Notre petit sujet correspond bien à ce contexte. Son attribution à une manufacture précise semble en revanche plus délicate. Sa propriétaire nous indique que sous la terrasse figurent « un A et un L, accolé ». Il peut s’agir de la marque de l’artisan qui a réalisé le modèle de la pièce, ou de celui qui l’a peinte, mais ce n’est apparemment pas le signe distinctif d’une manufacture. L’objet a pu être produit en France ou en Allemagne, au XVIIIème ou vraisemblablement au XIXème siècle, lorsque la mode est aux styles Louis XV et Louis XVI. S’il n’a pas de manque ou de fêle, il pourrait trouver preneur en vente publique autour d’une centaine d’euros. Mais après tout, le rêve a-t-il un prix ?...
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